Depuis la première politique commune de la pêche (PCP) de 1983, le secteur de la pêche professionnelle en mer en France métropolitaine a profondément évolué. L’actualisation des chiffres clés sur ce secteur économique à l’échelle de la France permet de faire un état des lieux sur la transformation des activités de la pêche professionnelle et témoigne des nouveaux enjeux qu’elles rencontrent. Tenir compte de ces enjeux est indispensable pour améliorer la gestion des pêches en mer et ainsi contribuer à assurer la sécurité alimentaire nationale.
Depuis la politique commune de la pêche (PCP) de l’Union européenne (UE), la France connait des réorganisations politiques en matière de gestion des pêches. En tant qu’Etat membre, la France s’est engagée dans la mise en œuvre d’une durabilité des activités halieutiques et aquacoles. Cette approche de gestion implique d’assurer la viabilité socio-économique des entreprises de pêche tout en assurant la préservation des ressources et des écosystèmes marins. Dans ce contexte, le secteur de la pêche professionnelle en mer connait de nombreuses transformations, qui ne vont pas toujours dans le sens de sa pérennisation. En effet, la pêche en mer, et plus particulièrement la petite pêche côtière, est aujourd’hui confrontée à de nouveaux enjeux à la fois écologiques et socio-économiques : changement climatique bouleversant la biodiversité marine, raréfaction des ressources, crise sanitaire du COVID-19, diminution du nombre de bateaux de pêche et des emplois, compétition pour l’espace maritime face à l’intensification des usages (éolien offshore, plaisance, etc.), importation des produits de la mer de l’étranger. Les chiffres actualisés intégrant différentes dimensions de ce secteur d’activité permettent de mieux comprendre les difficultés que connait la pêche professionnelle française.
Les caractéristiques techniques d’un navire de pêche moyen (SIH, Ifremer, 2022) :
- France métropolitaine
En France, la longueur moyenne d’un navire de pêche professionnel est de 10,9 m pour une puissance motrice moyenne de 165 kW et un âge moyen de 31 ans. Le nombre moyen de marins embarqués à bord est de 2,5.
- Façade Atlantique
Le navire moyen mesure 12,3 m de longueur pour une puissance motrice moyenne est de 202 kW et un âge moyen de 29 ans. Le nombre moyen de marins embarqués à bord est de 2,9.
- Façade Manche mer du Nord
Le navire moyen mesure 11,6 m de longueur pour une puissance motrice moyenne est de 178 kW et un âge moyen de 29 ans. Le nombre moyen de marins embarqués à bord est de 2,9.
- Façade méditerranéenne française
Le navire moyen mesure 8,7 m de longueur pour une puissance motrice moyenne est de 108 kW et un âge moyen de 34 ans. Le nombre moyen de marins embarqués à bord est de 1,6.
Evolution du nombre de bateaux de pêche professionnelle en mer
- Le nombre de navires de pêche en forte baisse depuis 30 ans (SIH, Ifremer, 2022)
En près de 30 ans, la flotte de pêche française a perdu 53% de ses navires : passant de 8 771 bateaux de pêche professionnelle, inscrits au registre Flotte de Pêche Communautaire (FCP), en 1990 à 4 163 en 2020.
Sur les 4 163, 1 310 sont situés sur la façade méditerranéenne, 1 281 en Mer du Nord et Manche et 1 572 sur la façade Atlantique.
Cette diminution du nombre de navires affecte l’ensemble des classes de taille des navires. En 2020, il y avait :
- 3 341 bateaux de pêche de moins de 12 mètres, soit une diminution de 49% par rapport 1990 ;
- 635 bateaux de pêche entre 12 et 24 mètres. Entre 1990 et 2020, soit une diminution de 64% par rapport 1990 ;
- 187 bateaux de pêche de plus que 24 mètres (155 entre 24 et 40 mètres et 36 de 40 mètres et plus) soit une diminution de 43% par rapport 1990.
Evolution du nombre d’emplois liés à la pêche professionnelle en mer (Observatoire prospectif des métiers et des qualifications de la Pêche, 2022)
- Le nombre d’emplois directs(1) de la pêche professionnelle en mer en baisse
En 2021, le secteur de la pêche professionnelle maritime comptait 13 777 emplois directs de marins-pêcheurs dont 6 140 dans la petite pêche. Entre 2020 et 2021, ce secteur a connu une diminution de 9% soit une perte de 1 749 marins-pêcheurs.
- Evolution du nombre d’emplois directs par genre de navigation
L’ensemble des genres de navigation(2) sont concernés par cette diminution du nombre de marins-pêcheurs. Elle est principalement due à la forte baisse du nombre d’emplois dans la petite pêche :
- La petite pêche connait une diminution de ses effectifs, entre 2020 et 2021, de 20,4%
- La pêche côtière connait une augmentation de ses effectifs, entre 2020 et 2021, de 17%.
- La pêche au large connait une diminution de ses effectifs, entre 2020 et 2021, de 5,2%
- La grande pêche connait une évolution à la hausse de 6,1%.
- Nombre d’emplois indirects(3) induits par la pêche professionnelle en mer
Selon le Comité national des pêches maritimes et des élevages marins, dans le secteur de la pêche maritime professionnelle, un emploi embarqué génère approximativement 3 à 4 emplois à terre au sein de la filière aval. Les emplois indirects sont présents dans différents secteurs d’activités tels que la construction navale, l’équipement des navires et des marins, la commercialisation et la transformation des produits de la pêche.
Situation de la production et de la consommation des produits de la pêche (FranceAgriMer, 2022)
- Volume et valeur des produits de la pêche professionnelle en mer vendus en France
En 2021, 239 065 tonnes de produits issus de la pêche fraîche (hors algues et pêche en eau douce) ont été débarquées en France métropolitaine (hors Corse). Ces débarquements représentent 669 millions d’euros.
- Volume et valeurs des produits de l’aquaculture
En France métropolitaine en 2020, la conchyliculture marine a produit 144 milliers de tonnes de coquillages contre 47 milliers de tonnes pour la pisciculture marine (élevage de poissons). Ces tonnages représentaient une valeur de 508 millions d’euros pour le coquillage et 234 millions d’euros pour la pisciculture.
- Les principales espèces vendues en volume en 2020
En France, les principales espèces vendues en 2020 étaient :
- Le thon : 134 280 tonnes vendues
- L’huître : 80 783 tonnes vendues
- La moule : 61 219 tonnes vendues
- La truite : 37 495 tonnes vendues
La consommation française des produits de la mer
- Consommation des Français en volume et en valeur en 2021
En 2021, 2 117 milliers de tonnes de produits de la mer ont été consommés par les Français. Ce volume de consommation des produits de la mer représente en valeur 6 554 millions d’euros.
- Consommation moyenne annuelle par habitants en 2017
En 2017, la consommation moyenne annuelle en produits de la mer par habitant en France était de 33,5 kg. Les principales espèces consommées par les français en 2017 sont :
- 3,9 kg, c’est la consommation moyenne annuelle de thon par habitant français
- 2,8 kg, c’est la consommation moyenne annuelle de cabillaud par habitant français
- 2,7 kg, c’est la consommation moyenne annuelle de saumon d’élevage par habitant français
- 2,4 kg, c’est la consommation moyenne annuelle de moules par habitant français
- 2,3 kg, c’est la consommation moyenne annuelle de lieu d’Alaska par habitant français
- Importation des produits de la mer en 2021
En 2021, 1 290 milliers de tonnes (poids net) de produits de la mer ont été importés en France.
En France, les 5 principales espèces importés en valeur en 2021 ont été :
- Saumon : 1 684 millions d’euros, augmentation de 39,5% par rapport à 2020
- Crevette tropicale : 657 millions d’euros, augmentation de 19% par rapport à 2020
- Cabillaud : 230 millions d’euro, diminution de 2% par rapport à 2020
- Thon listao : 219 millions d’euro, augmentation de 5,9% par rapport à 2020
- Thon albacore : 201 millions d’euro, diminution de 7% par rapport à 2020
En France, 70% des produits consommés sont issus de l’importation.
L’état des espèces pêchées en France (Vermard et Ulrich, 2024)
En France métropolitaine, 333 espèces ont été débarquées et commercialisées en 2022.
En 2022, 49 espèces contribuaient à 95% des volumes totaux débarqués en Atlantiques et 72 espèces en Méditerranée.
En 2022, 56 % des volumes de poissons débarqués en France provenaient de populations pêchées durablement, contre 51% en 2021 et 48 % en 2020.
Sur ces 56% de stocks pêchés durablement en 2022, 49% provenaient de stocks en bon état (4), comme le stock de coquille Saint Jacques (Pecten maximus) en Manche, ou le stock de Baudroies (Lophius piscatorius) en Golfe de Gascogne et Mer Celtique, et 7 % étaient issus de stocks jugés reconstituables (5) ou en reconstitution, comme le stock de Thon rouge (Thunnus thynnus) en Méditerranée occidentale ou en Atlantique ou le Merlan (Merlangius merlangus) en golfe de Gascogne.
20 % des débarquements provenaient de stocks de poissons considérés comme surpêchés (et/ou dégradés) (6) en 2022, tels que les stocks de Sardine (Sardina pilchardus) en Atlantique Nord Est dans les sous zones du Golfe de Gascogne, Manche est – Mer du Nord et en Manche ouest -Mer Celtique ou le stock de Maquereau (Scomber scombrus) en Atlantique, contre 42% en 2000.
2 % des débarquements provenaient de stocks de poissons considérés comme effondrés (7) en 2022, tels que le stock de Merlu (Merluccius merluccius) en Méditerranée occidentale ou le stock de Lieu jaune en Manche ouest -Mer Celtique et Manche est- Mer du Nord, contre 11% en 2019 et 5 % en 2000.
20 % des débarquements provenaient de stocks de poissons non évalués (8) en 2022, comme le stock de Dorade royale (Sparus aurata) en Méditerranée occidentale, contre 16 % en 2019 et 23 % en 2000.
2 % des débarquements provenaient de stocks de poissons non classifié (9) en 2022 contre 12 % en 2000.
Focus sur l’état des espèces pêchées en Méditerranée française (Vermard et Ulrich, 2024)
En Méditerranée les chiffres sur l’état des stocks en 2022 sont moins positifs.
En 2022, 36 % des volumes de poissons débarqués en Méditerranée provenaient de populations pêchées durablement.
Sur ces 36% pêchés durablement, 34 % provenaient de stocks considérés comme reconstituables et uniquement 2 % des volumes débarqués provenaient de stocks de poissons considérés comme en bon état.
3% des débarquements en Méditerranée provenaient de stocks de poissons considérés en 2021 comme surpêchés et dégradés
6% des débarquements en Méditerranée provenaient de stocks de poissons considérés en 2021 comme effondrés.
Néanmoins, 54 % des débarquements en Méditerranée provenaient des stocks de poissons non évalués en 2022.
Définitions :
1 Emploi direct : dans le secteur de la pêche, la définition d’un emploi direct signifie l’emploi d’un marin-pêcheur embarqué en mer.
2 Genres de navigation : Différentes catégories de permis et de conditions dans lesquelles l'activité d'un navire ou engin flottant est réputée relever. Elles sont précisées par arrêté du ministre chargé de la mer.
3 Emploi indirect : dans le secteur de la pêche, ce terme indique les emplois de la filière qui se créent en marge de l’activité de pêche dans différents secteurs d’activité tels que la construction navale, l’équipement des navires et des marins, la commercialisation et la transformation des produits de la pêche.
4 Stock en bon état : Stock de poisson où la pression de pêche et la biomasse (poids total des organismes vivants) sont estimées compatibles avec l’objectif de rendement maximal durable (RMD)
5 Stock reconstituable ou en reconstitution : Stock de poisson où la pression de pêche est dans les normes - c’est-à-dire conforme au RDM, mais où la quantité de reproducteurs est encore insuffisante
6 Stock surpêchés : Stock de poisson où la pression de pêche est supérieure au RMD. Le stock est donc exploité au-delà de la limite explicite fixée pour assurer une reproduction sûre, ce qui risque de conduire à une baisse des populations, à une dégradation permanente du stock et dans un cas extrême à l’effondrement du stock.
7 Stock effondrés : Stock de poisson où la quantité de reproducteurs est insuffisante pour le renouvellement de la population. Ce qui ne conduit pas pour autant à l’extinction de l’espèce, mais plutôt celle des pêches, un stock effondré est un stock non exploitable.
8 Stock non évalué : Stock de poisson pour lequel il n’existe pas d’évaluation scientifique, du fait d’un manque de données et pour lequel les connaissances sont insuffisantes pour définir son état.
9Stock non classifié : Stock de poisson pour lequel il n’existe pas d’évaluation scientifique pour lequel les connaissances sont insuffisantes pour définir son état.
Bibliographie :
DIRM Méditerranée, 2016. Conseil maritime de façade Méditerranée – Fascicule opérationnel – L’État sur le littoral et en mer Méditerranée
FranceAgriMer, 2022. Chiffres-clés des filières pêche et aquaculture en France en 2022. https://www.franceagrimer.fr/content/download/69397/document/20230216_CC_p%C3%AAche_aqua_FR.pdf .
Ifremer. Système d'Informations Halieutiques, 2022. Synthèse de la flotte 2020 – France métropolitaine. 2020.https://archimer.ifremer.fr/doc/00746/85801/
Observatoire prospectif des métiers et des qualifications de la Pêche .2022. Rapport des métiers de la pêche et des cultures marines2021. L’observatoire prospectif des métiers et des qualifications de la pêche. https://www.ocapiat.fr/wp-content/uploads/RAPPORT-2021-PE%CC%82CHE-VD.pdf
Vermard Youen, Ulrich Clara (2024). Bilan 2023 du statut des ressources halieutiques débarquées par la pêche française hexagonale en 2022. https://archimer.ifremer.fr/doc/00877/98852/
Rédaction : C. Zeltner-Reig
Mise à jour : S. Spadoni
Date de la dernière mise à jour : 14/02/2024