Connaissez-vous cet engin ?
Le chalut est un engin de pêche appartenant à la famille des arts trainants (1) utilisé pour la capture de nombreuses espèces marines par les pêcheurs professionnels.
Comment reconnaitre un chalut ?
Le chalut est constitué essentiellement un filet en forme d’entonnoir remorqué par un bateau de pêche : le chalutier. Le chalutier est un navire de pêche dont la taille est supérieure à 12 mètres. Le chalut peut être trainé soit par un seul bateau (chalut à perche et chalut à panneaux), soit par deux bateaux opérant simultanément (chalut-bœuf). Le chalut est relié à son bateau par des longs câbles en acier, appelés funes. Un système combiné de panneaux, chaines (lest) et lièges ou flotteurs permet de maintenir l’ouverture du filet ainsi que d’en régler la forme et la profondeur.
La capture des animaux a lieu au sein de la poche de récupération, appelée aussi “cul de chalut,” correspondant à la partie finale du filet. La dimension des mailles de la poche de récupération est adaptée à l’espèce ciblée, selon la réglementation en vigueur.
En France, la flotte chalutière représentait en 2022 le 16% des bateaux français travaillant sur l'hexagone (Ifremer, 2022).
Où pêche le chalut ?
L’activité de chalutage, sauf dérogations, à lieu, généralement au de-là des 3 milles nautiques (décret national N° 90-95 du 25/01/1990 90/94 concernant les zones de pêche non couvertes par la réglementation communautaire de conservation et de gestion) mais des dérogations existent. Le chalut travaille, en fonction des espèces ciblées, au contact avec le fond (chalut de fond) ou en pleine eau, dans la zone comprise entre la surface et le fond (chalut pélagique). Le fait de pouvoir travailler dans des zones si différentes permets au chalut de cibler des espèces très différentes entre elles. Ses principales espèces cibles sont : pour le chalut pélagique sardines, anchois, harengs, maquereaux et pour le chalut de fond turbots, soles, plies, rougets, crevettes, langoustines, baudroies, etc.
Quelles conséquences pour l’environnement ?
Le chalut est un engin de pêche qui a la capacité de capturer des volumes importants d’animaux marins. Cette caractéristique, qui est considérée comme une véritable plus-value au niveau de la production, au niveau écologique il s’agit d’une véritable catastrophe. En effet, le chalut étant un engin peu sélectif, la capture des seules espèces cibles (2) est presque impossible. Tous les animaux sur son passage, dont la taille est supérieure à la taille de la maille du “cul de chalut”, sont piégés par le filet. Il s’agit donc d’une technique de pêche qui entraine un important nombre de prises accessoires (3). Dans les dernières années, les pêcheurs et la recherche scientifique se sont engagés pour améliorer la sélectivité du chalut. L’installation de grille de séparation entre espèces, des capteurs de reconnaissance de plus en plus sophistiqués ou encore de dispositifs d’échappement pour les espèces qui ne sont pas ciblées, l’utilisation de l’intelligence artificielle pour mesurer en temps réel l’incidence de l’engin, autant d’améliorations proposées et apportées aux chaluts.
Le chalut, en particulier le chalut de fond, est une technique de pêche qui a des impacts négatifs sur les écosystèmes marins, tels que la dégradation et la destruction d'habitats, mais aussi sur les populations de poissons et autre organismes marins. En effet, travaillant au contact direct avec le sol le chalut peut, lors de son passage, arracher, écraser, enterrer ou exposer hors du substrat certaines espèces vulnérables ayant une croissance lente qui vivent à proximité du sol ou abimer certains habitats marins et mener à une diminution de leur complexité. Chaque espèce, en fonction de sa fragilité et sa nature, subira de façon variable les effets du chalutage. De même, tous les habitats ne subiront pas de la même façon le passage du chalut. Certains habitats, tels que les herbiers ou les coraux, sont plus sensibles et vulnérables que d’autres car dans le cas d’une dégradation des décennies seront nécessaires pour leur reconstitution. D’autres, comme les zones qui subissent naturellement de fortes perturbations naturelles liées aux courants et aux marées, sont moins sensibles aux effets du chalutage. La perte d’organismes et d’habitats clés peut entrainer des conséquences importantes sur la chaine alimentaire ainsi que sur le cycle de la matière des écosystèmes benthiques (5). De même, la remise en suspension des sédiments provoquée par le chalutage peut aussi avoir pour conséquence l’augmentation locale de la turbidité, l’homogénéisation des habitats et aussi la libération de contaminants mais aussi du CO2 piégé dans les sédiments, qui une fois libérés contribuent à l’augmentation de l’acidification des océans. Afin de limiter les perturbations crées par le chalutage, des nouvelles améliorations techniques, comme les panneaux volants qui permettent aux panneaux du chalut de “flotter” et de ne pas racler le fond, sont en train d’être expérimentés sur les bateaux.
Le chalut est un engin très énergivore, en consommant de grandes quantités de gasoil, et il présente donc un bilan désastreux en matière d’émissions de gaz à effet de serre. La demande en gasoil pour son fonctionnement est très élevée : pour un 1 kg de poisson pêché au chalut, l’engin consomme de 1-2 litres de gasoil et émet jusqu’à 6 ou 8 kg d’équivalent en CO2, soit quatre à dix fois plus que la pêche au filet ou au casier. (Gascuel, 2023). Des recherches sont également en cours pour limiter la consommation en gasoil.
Définitions :
- Les engins actifs ou arts trainants sont les engins qui lors de l’action de pêche sont déplacés sur le fond ou dans la colonne d’eau pour capturer les espèces recherchées.
- Les pêcheurs professionnels utilisent de nombreuses techniques de pêche différentes. Ils choisissent leur engin de pêche en fonction des espèces qu'ils recherchent et de la zone de pêche.
- Les prises accessoires sont toutes les captures d’espèces commercialisables faites pendant la pêche qui ne correspondent pas aux espèces et tailles des organismes marins ciblés. C’est l’exemple d’organismes de taille inférieure à la taille minimale de capture. Dans la majorité des cas, les prises accessoires sont des captures qui n’ont pas ou ont très peu d’intérêt économique pour le pêcheur.
- Les prises accidentelles sont toutes les captures d’espèces non commercialisables, souvent il s’agit d’espèces vulnérables ou protégées (tortues, requins, dauphins, etc.), dont la reproductivité est faible, pour lesquelles la pêche est interdites, qui sont faites accidentellement pendant la pêche.
- Les écosystèmes benthiques par opposition aux écosystèmes pélagiques sont les écosystèmes marins du fond. Le type de substrat, la qualité et la température de l’eau ainsi que ses paramètres physico-chimiques sont des facteurs essentiels pour un bon fonctionnement de ces écosystèmes.
Sources :
Didier Gascuel, 2023, La pêchécologie, édition Quae, 90p.
Ifremer. Système d'Informations Halieutiques (2022a). Flottille des Chalutiers non exclusifs. Façade Mer du Nord - Manche. 2021. Synthèse des flottilles de pêche. https://archimer.ifremer.fr/doc/00802/91441/
Ifremer. Système d'Informations Halieutiques (2022b). Flottille des Chalutiers exclusifs. Façade Mer du Nord - Manche. 2021. Synthèse des flottilles de pêche. https://archimer.ifremer.fr/doc/00802/91439/
Ifremer. Système d'Informations Halieutiques (2022b). Flottille des Chalutiers de fond. Façade Méditerranée. 2021. Synthèse des flottilles de pêche. https://archimer.ifremer.fr/doc/00802/91437/
Ifremer. Système d'Informations Halieutiques (2022c). Flottille des Chalutiers pélagiques et mixtes. Façade Méditerranée. 2021. Synthèse des flottilles de pêche. https://archimer.ifremer.fr/doc/00802/91442/
Illustrations : (c) Planète Mer